Depuis la Belgique, il y a 242 jours, je
voyage en rasant le sol avec l’avantage de decouvrir ce qui separe deux
destinations, mais aujourd’hui, je dois prendre l’avion. C’est bien sur
necessaire pour mes parents qui ne restent pas longtemps mais je ressens cela
avec une legere amertume en comparant avec le chemin parcouru jusqu’ici. Nous
retrouvons donc ma belle sœur Anastasia a l’aeroport de Bangkok avant de nous
envoler vers Krabi, sur la peninsule thai, pour rejoindre ensuite l’ile de Koh
Lanta.
Voila déjà quelques semaines que je suis
surexcite a l’idee de revoir la mer. Je l’ai certe apercu pres de Hai Phong au
Vietnam mais sans m’y etre baigne. Il me tarde donc de revoir cette etendue d’eau,
semblant infinie. Ce paysage vierge devoilant le plus doux profil de notre
ronde Terre.
Arrive a destination, le paysage est deja
different, ressemblant d’avantage aux cartes postales a cocotiers. Une fois
installe tous les cinq dans une maison un peu isole avec piscine et a 300m de
la mer, il ne nous faut pas longtemps pour aller y piquer une tete dans un
cadre paradisiaque. Nous savourons ainsi le confort d’un « chez
soit » permettant une totale autonomie. Petits dejeuners en terrasse,
apero aux vins, ‘tit punchs et saucissons importes… on se croirait a la
maison ! Nous louons aussi des scooters permettant de visiter l’ile a
notre guise en totale independance.
L’ile peut etre decrite suivant 2 zones,
separees par un canal. Plate, avec des mangroves et apparemment pas touristique
au Nord-Est ; legerement montagneuse sur la partie allongee du Sud. Cette
derniere presente des plages plutôt vaseuses a l’Est tandis que nous trouvons
de belles plage de sable a l’Ouest ; ou s’est fatalement developpe le tourisme.
A la pointe Sud, un parc naturel abrite une riche vegetation exotique parmi
laquelle nous avons la chance d’apercevoir des singes. Sur la cote, des rochers
submergees offrent de magnifiques scenes vivantes a decouvrir en snorkeling
(plongee avec tuba). La biodiversite marine est en effet remarquable (forcement
si on compare avec la Manche…), raison pour laquelle nous reservons une demie
journee en mer afin d’y plonger.
Sebastien et Nastya, avec déjà un bon nombre
de plongees a leur actif ne necessitent que d’un complement de materiel et d’un
plongeur guide. Mes parents en resteront a la formule snorkeling. J’aurais en
revanche le privilege de faire un bapteme de plongee ! Oui !!
J’aurais droit aux palmes, masque, tuba, la combinaison, la bouteille sur le
dos et meme une monitrice rigolote aux jolis yeux bleus !
Deux jours plus tot, je recois donc un manuel
d’initiation et un premier briefing sur les techniques de la plongee, les
dangers, la communication gestuelle, etc. Entre temps a la maison, nous
profitons aussi de la piscine pour desangoisser ma mere a respirer par un tuba.
10 minutes et c’est regle. Incroyable !!
Le jour J, nous sommes tous excite de ce qui
nous attend. Je recois alors un second briefing sur le deroulement du bapteme
pas a pas. C’est ensuite le moment d’embarquer sur un hors-bord avec l’equipe
et un autre couple. Simplement la sortie en bateau est vraiment chouette. Pendant
20 minutes nous voyons Koh Lanta de plus en plus dans son entierete en nous
dirigeant vers un petit ilot recence zone protegee.
Une fois arrive les plongeurs s’equipent et se
mettent a l’eau un par un, avant que vienne mon tour. Attirail sur le dos et le
gilet gonfle, je garde une main sur la ceinture de plomb, l’autre sur le
masque. Mais une fois n’est pas coutume, ce n’est non pas en bombe mais par un
pas en avant que je me lance a l’eau.
Premiere satisfaction : tout va bien, mon
costume d’astronaute me garde a la surface ! Le premier exercice est déjà
de respirer par le detendeur. Ah-ah-ah ! Croyez moi, c’est contre nature
et cela demande beaucoup de concentration pour y parvenir, meme coache par
Sarah ma monitrice ! Les premieres
secondes se revelent vraiment difficiles, le but etant bien sur de respirer le
plus constamment possible sans vider la bouteille en 5 minutes… Nous sommes
tout juste immerge et sentant que je ne suis pas parfaitement serein, Sarah me
montre alors l’environnement. Face au spectacle et sans me rendre compte, je
trouve alors mon rythme respiratoire. Sous nos pieds et avec une visibilite de
10 ou 15m, la faune et la flore marine bat son plein. Petit, gros, gris, jaune,
rouge, raye, inoffensif ou un peu moins, les poissons nous teleportent dans un
autre monde, difficilement imaginable depuis la surface.
A present detendu, Sarah me fait passer une
serie d’exercices. Tout d’abord, nous descendons un peu plus profondement grace
a notre gilet que l’on peut gonfler ou degonfler grace a une manette. Ainsi
nous pouvons stagner a une meme profondeur, a condition de ne pas gonfler ou
vider excessivement les poumons, combien meme notre « altitude »
suivrait.
Je m’excerce donc a la perte du detendeur qui
se recupere par un mouvement rotatif du bras droit vers l’arriere, puis par une
expiration forte dans celui ci pour enlever l’eau. L’exercice de la vidange du
masque s’il contient de l’eau est aussi destabilisant puisqu’il faut expirer
par le nez en maintenant le haut du masque plaque. Enfin, en cas de probleme
d’air, nous faisons l’exercice du partage du detendeur de secours.
Moi qui pensais y passer un temps fou, il ne
nous faut que 5 ou 10 minutes pour regler ca et partir en ballade, toujours a
ne communiquer que par gestes codes minimalistes.
Nous plongeons alors sur deux sites autour de
l’ilot pendant quasiment 1h chaque fois. Je decouvre alors un univers
merveilleux, par l’ecosysteme bien sur mais aussi par l’ambiance qu’il y regne.
La notion du temps semble se distordre dans ce silence on ne peut plus
apaisant. Le mouvement des poissons en banc, telle l’aura meme de la mer, se
revele aussi envoutant qu’insaisissable. D’ici, la surface de l’eau apparait
comme un toit, une frontiere entre deux mondes. La texture visqueuse qu’elle
genere, refletant a different degre la lumiere du soleil, est a elle seule une
merveille de la nature. Enfin, le fait de pouvoir se deplacer en 3 dimensions a
tromper les regles de la gravite, me rappel la sensation du vol. Je profite d’ailleurs
que Sarah ai le dos tourne pour m’amuser comme un enfant a avancer en vrille.
Pendant ces deux plongees, nous observons une
centaine d’especes animales si ce n’est pas beaucoup plus. Je suis d’ailleurs
surpris qu’ils ne s’enfuient pas d’avantage en notre presence. Plusieurs
murenes restent bien a l’abri dans des rochers a me regarder sans cligner de
l’œil. En entrouvrant leur gueule, je peux d’ailleurs voir leurs dents acerees.
Rien a voir avec cette tortue que l’on voit debouler lentement dans un coin du
masque et que nous suivons du regard par 6m de profondeur. Nul envi de bouger,
toute notre attention lui ai dediee. Elle remonte alors a la surface en agitant
ses nageoires de la meme manière qu’un oiseau, regarde 3 secondes le temps
qu’il fait la haut puis replonge. Voici un moment d’une infinie poesie que je
ne suis pas prêt d’oublier.
Quand se termine le bapteme, je sors de l’eau
euphorique, souhaitant ni plus ni moins renouveler l’experience. Notons que de
retour sur la terre ferme, je garde toute la journee une legere sensation de
planer du a l’exces d’azote non evacue dans mon sang, c’est rigolo !
Tout du long, je garde contact avec Alex et
Clemence afin de nous retrouver une 5eme fois ! Mon frere ayant oublie de
me prendre un billet d’avion retour pour Bangkok (pas si mal finalement !),
nous decidons de nous rejoindre dans la region de Krabi le 5 avril, sur un spot
d’escalade sur la cote mondialement reconnu.
Ce 5 avril donc, j’accompagne la famille
jusque leur hotel pres de l’aeroport de Krabi (vol tres tot) ou je m’emploie a
de nouveaux adieux. J’ai l’impression de revivre le meme instant qu’en France,
a la difference que j’en sais desormais d’avantage sur cette aventure et les
manières de me tirer de situations delicates. Il y a encore moins de raisons de
s’inquieter a present, le voyage est mon quotidien ! Je fais finalement 3
fois le tour des bisouilles en sechant les larmes de la maman avant d’atteler
de nouveau mes sacs a moi.
Le jour ne va pas tarder a tomber et je ne
suis pas sur d’atteindre le petit village de Tonsai perdu dans un cirque
montagneux et accessible que par bateau. J’arrive donc a m’entasser dans un
minibus déjà quasiment plein jusque Krabi sans savoir vraiment ou se font les
correspondances. J’annonce donc juste ma destination finale au chauffeur qui
semble avoir eu une journee difficile a en juger son humeur. Je suis donc
depose en centre ville juste derriere la navette qui nous conduira a Ao Nang,
sur la cote. Il fait a present nuit. Le temps d’attendre que les banquettes se
remplissent et nous sommes partis.
Je suis alors tres surpris par Ao Nang, moi
qui m’attendais a un moindre tourisme qu’a Koh Lanta, c’est finalement pire.
Tout le long de la cote se succedent restaurants, bar, shopping, et les locaux
semblent avoir desertes les environs. Alex m’a prevenu que passe 19h, le cout
de la navette en bateau explose pouvant passer de 100B a 600B s’il n’y a
personne d’autre pour remplir le bateau. Comme il est 20h, je pars dans
l’optique de franchir la barriere montagneuse a pied. J’ai en effet lu sur
internet qu’il est possible de rejoindre Tonsai a pied via 2h de marche. Mais apres
avoir demande confirmation a des masseuses, il semblerait que cela soit
possible mais depuis l’Est et non l’Ouest. A vrai dire, je n’y serais meme pas
parvenu. Je suis epuise et pas encore remis de la soiree de la veille, alors
randonner en pleine jungle montagneuse, de nuit et charge comme trois mules… Il
ne fallait meme pas y compter. C’est impressionnant de voir a quel point la
fatigue peut tout simplement faire perdre la raison.
Je dors debout. J’ai la possibilite de camper
sur la plage tandis que les touristes se promenent a cote, ou tenter le tout
pour le tout en cherchant un bateau. Sur la plage, un capitaine m’interpelle et
me propose de m’emmener. « C’est 600B sinon il faut attendre 5 autres
personnes". Mais vu l’heure, je n’ai pas le temps de jouer au client
fidele, alors je pars vers un autre bateau qui me reclame 200B avant de me
refuser sans que je ne comprenne pourquoi. Le premier capitaine m’annonce alors
que c’est son ami et que si je donne a chacun 100B, je peux monter. C’est le
dernier maillon manquant alors ok, j’embarque a bord avec une famille
israelienne.
Bon, jusque la vous sentez la
filouterie ?! Parce que sur le coup, ca ne me semblais pas si mal… Une
fois arrive, je tends donc au capitaine les 100B que j’ai pris soin de
totaliser en petite monnaie pour m’alleger. Immediatement, celui-ci s’enerve,
reclamant le double et en donnant un coup dans ma main. Aussi, je suis
tellement charge et il est si tard que je n’ai pas le choix de prendre avec
clemence son chantage de me ramener a Ao Nang si je ne lui donne pas 200B. Je
recupere alors quelques 30B qui ne sont pas passe sous le plancher avant de le
payer. Chers amis, je viens de me faire arnaque !
Finalement, en pesant les elements, je ne suis
pas si mecontent de l’experience. Etant epuise, tard le soir et avec les
copains au bout, j’ai de quoi m’estimer heureux de ne payer que 3 fois le prix
de la course de jour ! Et puis c’est la premiere duperie depuis 8 mois a
voyager alors que j’entends toute sorte d’histoire autour de moi. Disons que
c’était le jour de repos de ma bonne etoile.
Je parviens donc a rejoindre Alex et Clemence
a leur bungalow tandis qu’ils ne s’attendaient meme plus a me voir ce soir. La
cote de 2km pour atteindre la derniere guest house du village aurait en effet
pu m’achever.
En transition a la villa tip top deluxe avec
piscine de Koh Lanta, je m’autorise un bungalow ; definitivement le
dernier du village avant la jungle. Je ne pouvais pas mieux tomber.
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