dimanche 24 août 2014

24 Aout 2014 : Portes de la Mongolie

Au petit matin, Natacha nous prepare un petit dejeuner consistant et je suis conduit par Ramon a la frontiere. Les terres que je vois a present au loin devant moi sont celles de la Mongolie. La magie de l’instant me saisi. Aurais-je cru en arriver la et de cette manière quand j’ai commence a rever de grands voyages…? Il est bon de temps en temps de s’auto congratuler.

Les adieux sont chaleureux et je me prepare a passer la frontiere a pied de nouveau, mais ce coup ci, ce n’est pas possible. Une femme me propose ses services de taxi et je n’ai malheureusement pas trop le choix.
Des agents fouillent mes bagages en partie et je passe sans trop de probleme et muni de patience, meme si une fois de plus il parait difficilement comprehensible que je puisse voyager a pied.
 
Alors que nous nous appretons a passer la derniere barriere, il semble que les documents de ma chauffeuse ne soient pas en regle. Il lui faut alors 10 minutes pour faire une marche arriere de 100m en zigzagant sans cesse et en grincant de l’embrayage. Apres donc quelques minutes supplementaires, le poste de frontiere est derriere moi. Mon cœur palpite mais la joie ne sera que de courte duree puisqu’un malentendu nait entre la chauffeuse et moi quand au tarif de la course. La somme demande est en milliers de Tugrik (monnaie Mongole 1euro=2400T) et ne m’etant pas renseigne auparavant quant au taux de change, la somme me parait exorbitante. Je tente de negocier mais elle maintien sa position alors que le ton monte. Situation de crise activee : j’ouvre la porte et sors mon gros sac que j’ai alors sur les genoux. La dame attrape le petit et je dois user de la force pour le lui arracher.
Que je suis con ! D’une j’aurais du me renseigner sur la monnaie Mongole, de deux je devais me renseigner correctement sur le tarif de la course et de trois … si je deguerpi maintenant, elle me suivra et appelera du renfort. Je dois donc me resigner a me plier suffisamment pour ne pas avoir les flics aux fesses apres seulement 10 minutes sur le territoire…

Nous rencontrons alors une de ses connaissances qui me donne le taux de change. Ca me coute environ 8 euros ; autant dire que je me fais avoir mais je n’ai eu que de bonnes experiences jusque la, il en faut aussi des mauvaises… Calme et conciliation me seront plus utiles maintenant plutôt que de faire un scandale.

En ce debut d’apres midi, je tends pour la premiere fois le pouce en Mongolie en marchant a travers cette toute petite ville elancee le long de la route principale. Des enfants curieux me suivent a velo et me tournent autour en répétant « hello ! ». Leurs traits de visage changent encore du physique Russe de la region du Lac Baikal. Leur peau est legerement plus foncee et leur yeux un peu plus bride. Notons que bien entendu, la Russie est tellement etendue que les fasies s’ « asiatisent » d’Ouest en Est.

Avant meme d’atteindre la fin de l’agglomération et malgre une circulation quasi absente, je suis pris par un vieux couple jusque la ville suivante, Sukhbaatar, 20km plus loin. Avant de nous separer, ils me proposent des œufs que je prefere refuser par soucis d’une omelette prématurée dans le sac. Le visage de ces personnes est tres touchant. La rudesse du climat pourrait etre lu sur leurs rides ; leur sourire temoigne de leur generosite et leur regard inspire la sagesse. Qui a dit qu’il y avait forcement besoin d’une communication verbale pour decouvrir des personnes… ?

Ici je trouve une serie de moulins a prieres que je fais tourner consciencieusement mais sans pour autant etre bouddhiste. C’est pour moi comme une manière de remercier ma bonne etoile qui m’a suivi jusque la.

30 minutes sur le bord de la route avec une pancarte « Ulan Baatar » en cyrilique (et oui !) m’est necessaire pour qu’une nouvelle voiture s’arrete. On me laisse la place avant tandis que 5 personnes s’entassent sur la banquette arriere. Cette famille se rend a la capitale et les chants mongols du conducteur me mettent de tres bonne humeur, devorant de surcroit les paysages du regard. En route nous embarquons une autre personne jusque Darkhan ou en sortant il donne tout naturellement quelques billets au conducteur. Mince ! Gene mais souhaitant respecter les fondements de l’auto-stop, j’use de la gestuelle pour lui dire que je vais descendre ici aussi. Je ne saurais jamais s’il voulait bien me prendre gratuitement jusque Ulan Baatar mais je prefere que ce doute ne tourne pas plus en ma faveur.

En cette heure tardive, la certitude d’arriver a destination s’estampe ; et je suis en pleine ville. En sortir est maintenant la priorite pour passer la nuit a la belle etoile.

Je marche malgre tout avec ma pancarte a la main alors qu’un homme et sa fille me prennent. Elle, parle suffisamment anglais pour que je lui explique mes intentions. Ils sont d’ici et pour m’aider, ils me deposent sur la route principale, a la sortie de la ville ou est d’ailleurs la gare routiere. En sortant de la voiture, je deviens l’attraction et nombre de personnes me proposent leur service de taxi, qu’ils soient officiels ou non. Seulement maintenant j’ai le meilleur outil possible : une phrase en mongol que la fille m’a ecrite et indiquant ma situation et ma destination. Cette nouvelle traductions complete alors ma collection. La reaction des gens la lisant devient alors tres aussi amusante qu’interessante. Il semble que l’auto-stop inspire plus l’audace qu’autre chose ici ou l’on pratique plutôt le covoiturage. Certains y voient probablement qu’une arrogance occidentale et me rient au nez gentiment. Je souris alors en courbant l’echine. D’autres ne semblent pas refuter le principe, inspires peut etre par la curiosite, comme ces gens qui interpellent pour moi un bus en partance. Le chauffeur lit a son tour ma note et me fait signe de monter. Surpris de l’offre spontanee, je repete a la limite de l’indécence, ne pas vouloir payer. Mais il maintient son offre. Le temps de charger mon gros sac en soute et me voici dans un bus pour quelques 5h de route entoure de personnes ayant paye leur place ; situation paradoxalement assez peu confortable.

J’imagine durant un bon moment que le chauffeur retourne sa veste une fois arrive, mais la fatigue prend le dessus et seuls les portions de tout terrain me reveillent. Lorsque je jette un œil dehors, je discerne a peine le relief du ciel obscure. Je peux oublier ici les halos lumineux dans le ciel et dominant les grandes villes. Quant aux phares des vehicules qui nous doublent ou nous croisent, ils semblent indiquer une route de 200m de large. Mais je fais erreur, il n’y a juste plus de route, seulement une multitude de chemins en terre battue, façonnées par le temps et offrant de spectaculaires nids de poule. Mais a partir de quand un nid de poule devient spectaculaire me direz vous… ? Imaginez donc ; lorsque le bus est tellement penche vous le visualisez se renverser de votre cote et totalement a votre insu, vous verifiez la corpulence de votre voisin de l’autre cote de l’allee, histoire de savoir si sa chute vous sera douloureuse. Bienvenue dans les steppes mongoles !

Vers 1h du matin de ce 25 Aout, nous arrivons a Ulan Baatar, la capitale mongole. J’emerge a peine qu’une jeune femme vient a moi et me demande « Where are you going ? ». A vrai dire, je ne sais moi-même pas vraiment. Je n’ai pas pu verifier le statut de mes demandes d’hebergement sur CouchSurfing depuis longtemps et il est trop tard pour payer une nuit d’auberge dont je ne profiterais pas entierement. Je lui reponds alors vouloir simplement me rendre dans le centre ville pour passer la nuit dans un coin tranquille. Comme elle s’y rend aussi avec sa mere et son fils, elle me propose alors de partager un taxi ; que j’accepte, toujours endormi et les yeux colles.

En route nous discutons un peu pour en savoir d’avantage sur l’un et l’autre. 10 minutes de trajets plus tard, Uka, traductrice mongole – anglais, m’invite a dormir chez elle cette nuit, me permettant de trouver un autre toit tranquillement demain. Quel rebondissement ! Quel bonheur ! J’ai bien fais de tourner les moulins a prieres tout a l’heure !!

Je recois une visite de son appartement puis, hâté par l’heure tardive, Uka m’invite a dormir sur le sofa quand elle, sa mere et son fils prennent place dans le lit de la chambre. 

Aujourd’hui, j’ai atteint la Mongolie en auto-stop depuis la Belgique et par L’Allemagne, la Pologne, la Lituanie, la Lettonie et la Russie. C’est faisable, sachez-le, et ceux qui le tenteront ne le regretteront pas. Pour ma part, c’est a ce jour la plus merveilleuse chose qui m’est été donne de Vivre, et par ces mots, j’envois mes plus sinceres et chaleureux remerciements a toutes les personnes qui sont intervenues dans cette aventure qui est a present aussi la leur.

samedi 23 août 2014

23 Aout 2014 : En route pour la Mongolie.

Apres ces quelques jours extraordinaires au bord du lac Baikal, il est temps de reprendre la route. Je pourrai passer encore du bon temps ici malgre les aleas de la meteo mais je ne suis plus qu’a une journee ou deux de la Mongolie. La Mongolie !! Ce pays, cette region qui fascine tellement de voyageurs ; est veritablement a porte de pouce !

Parallelement a cela Mylene, une amie de France, me rejoindra a Ulan-Bataar par avion le 27 Aout pour 3 semaines de tourisme. Quelques jours d’avances sont aussi a prevoir afin de lancer ma demande de visa chinois qui ne s’annonce pas si facile (les infos pratiques suivront).

A l’aube je demonte l’abris et refais mon sac, triste de quitter ce lieu merveilleux mais le pouce fretillant de nouvelles rencontres, nouvelles contrees et nouvelles experiences.

Je remarque cependant que le niveau de l’eau a monte de 10 ou 20 cm, submergeant d’avantage l’ile voisine. En passant de l’autre cote de la mienne, je constate aussi les consequences des dernieres intemperies. Rien de bien mechant mais je dois chausser cette fois ci mes sandales pour traverser la riviere qui m’apparaissait avant comme une plage de gallet. Toutes mes pensees vont alors a Christopher Mc Candless qui s’est en effet retrouve bloque dans une zone d’Alaska par un torrent du a la fonte des neiges et est decede quelque temps plus tard (1992) par sous-alimentation ou intoxication.

Une fois sur la route, je trouve assez rapidement Anna & Ivan qui m’enmenent jusque Selenginsk. En 2h30 de route, je me sens déjà comme adopte par ce couple alors que ca ne semblait pas gagne d’avance. Comme frequemment  en Russie. Ivan me proposera meme de conduire sa voiture. Mais n’ayant pas mon permis international, je prefere eviter meme s’il aurait été drole de conduire avec le volant a droite.















J’attends ensuite un peu moins d’une heure pour qu’une jeune conductrice s’arrete. En la voyant passer a mon niveau, je n’imagine pas qu’elle me prenne mais je fait finalement erreur ! En voila une autre qui m’annonce que ma bonne gueule a joue en ma faveur ! Alice m’offre un petit repas sur la route et m’enmene a Ulan Oude pour une visite top chrono du centre ville. En fait, il y a surtout la plus grosse tete de Lenine sculpte au Monde mais quitte a etre dans le coin, autant y jeter un coup d’oeil !













Apres cette minute de culture, elle me conduit sur la route pour la Mongolie bien a l’exterieur de la ville. Voila une grosse epine retiree du pied.
Le soleil ne tardera pas a effleurer les reliefs alentours quand je prevois de passer la nuit sur le bord de la route qui mene en Mongolie.


Mais cela ne coute rien de tendre le pouce encore un peu tant que je reste en dehors des villes. Un premier vieux couple me fait faire quelques petits kilometres puis c’est un mini bus hors service qui m’embarque. Je ne suis pas tout a fait a l’aise de peur qu’on me demande de payer a la fin, alors j’entame les presentations avec les deux occupants afin de créer un rapport particulier, peut importe que je me trompe a leur sujet ou non. Nous roulons une bonne heure et sur un double malentendu, Alexander et Serguei me deposent a un super marche a Gusinoozyorsk ou je refais le plein de provisions elementaires a savoir, du pain, du saucisson, du chocolat et de l’eau. En sortant, je trouve mes compagnons toujours au meme endroit, m’attendant pour me laisser enfin sur l’axe principal pour Khyagt, la ville frontaliere avec la Mongolie. Une fois de plus c’est une « claque positive » que prennent mes prejuges.
 
Je m’imagine a present dans une mauvaise posture dans cette ville ou la nuit est déjà tombee. Nourri alors d’esperance, je tends a nouveau le pouce. 10 minutes plus tard, ma bonne etoile refait son apparition quand un jeune couple de mon age s’arrete d’autant plus que leur destination n’est pas moins que la mienne ! En passant la nuit a la belle etoile en bordure de Khyagt je pourrai franchir la frontiere Mongole demain matin. J’avance d’avantage qu’espere !

Dans la voiture, Natacha au volant et Ramon son futur mari, ne laisse que peut de repit a ma fatigue. Ils me questionnent quand a mon voyage et semblent ravi d’y prendre part. Ramon me donne a manger, une biere et des cigarettes tout le long du trajet. Il fini par etre quasiment dos a la route alors qu’il me montre sur son ordinateur portable des photos de lui a la peche avec des amis, de sa famille ou de sa ceremonie de nomination au grade d’officier militaire. Sa carrure cole en effet avec sa profession, mais un peu moins avec sa passion : l’ornithologie ! Natacha elle, est etudiante en droit et se doit de rester concentree sur la route et les nids de poule qui alertent a son compagnon, craintif pour sa voiture. Monsieur fait la lecon de conduite a Madame, mais prefere visiblement siroter ses bieres en me faisant la conversation. Assis sur la banquette arriere, je m’amuse discretement de la scene.

Une chouette ambiance nee dans l’habitacle au point que Ramon me decrit comme son meilleur ami Europeen… et aussi le premier !
Comme frequemment, mes nouveaux amis se soucient de la ou je passerai la nuit. Plein d’assurance mais malgre tout avec une idee derriere la tete, je parle de dormir a la belle etoile ; mes dernieres experiences a l’appui. Leur hospitalite ne se fera pas attendre. Me voila en presence de personnes exceptionnelles, une fois de plus en Russie.

En arrivant dans leur petit appartement a Khyagt, vers 23h, je suis prie de prendre mes aises et Ramon me demande mes vetements a laver. Une douche chaude me rappelle mes derniers jours dans la nature ou chaque bain dans la riviere se suivait de grelotements que le feu de camp, prepare d’avance, apaisait. Pendant ce temps, Natacha est en cuisine et a ma sortie, c’est a un veritable festin qu’ils m’invitent. Des legumes crus, une salade typique russe nommee « seldka pod shuboy » - « Hareng sous son manteau de fourrure », de la charcuterie, du pain et des pierozki et du poisson seche (Gorbusha - saumon, Lesh’ - dorade, Keta – saumon d’Atlantique) pour completer la biere : coutume russe.

Tout le long du repas, nous oeuvrons a etablir une communication tant bien que mal et avec l’aide precieuse d’un traducteur en ligne. Tous les sujets possibles y passent que ce soit pour mieux se connaitre ou simplement pour rigoler. Ils me surnomment d’ailleurs « Gonchaya poroda » – « maigre chien de chasse » en vue de ma carrure, ridicule comparee a celle de Ramon. J’y apprends aussi l’expression « nishtyak » comparable a « super », a la difference que je les fais toujours bien rigoler en l’employant ; pousse aussi a la repetition par Ramon sans cesse.
La soiree s’etend assez longuement alors que nous sommes déjà en tenue de nuit : nuisette pour Natacha, torse nu pour Ramon et moi. C’est simple, naturel et cocasse a la fois !



Vers 2h du matin la fatigue me retombe dessus et mes paupieres ne tiennent plus. Nous passons dans le sejour ou ils dorment dans un canape convertible alors que mon matelat en mousse est pose sur la moquette. Quand quelques heures plus tot je m’attendais a dormir dehors sans savoir ou ni comment, j’ai a present de quoi dormir sur mes deux oreilles.

mardi 19 août 2014

19 - 22 Aout 2014 : Camp sur les rives de la Snezhnaya.

- Mon campement prend peu a peu des allures de cabane de Robinson Crusoe auquel je me compare de temps a autre en souriant. Peu a peu, je trouve ici la sensation d'un domicile grace a un confort jamais egale en termes de bivouac. J'ai mon espace de couchage, un toit que je ferme la nuit, deux bancs autour du feu selon l'orientation du vent, un etandage a linge et meme une toilette seche !














- Je passe la majeure partie de mon temps simplement en short de bain, ou avec une chemise ouverte et un chapeau sans forme pour me proteger un minimum du soleil qui peut cogner dur.

- Je tente a nouveau de pecher en variant les techniques et les endroits mais rien y fait. Le courant est aussi tellement fort que je peux tres difficilement changer de rive.

- Je me retrouve pendant ces quelques jours directement lie aux elements naturels tels que l’eau, le feu et le vent. Le reste ne parait que superflux.














- L’envie d’ecouter de la musique m’atteint parfois. Grace aux centaines de chansons enregistrees sur mon telephone, j’essais des artistes que j’apprecie generalement beaucoup. Mais aucune ne colle au contexte excepte Le Temps qui Reste, de Serge Reggiani.
La notion du temps prend en effet des allures encore bien differentes, je vis avec la nature. Mes graces matinees n’excedent pas 8h et je ne me couche pas avant d’avoir pu contempler les etoiles quand celles-ci se montrent.

- Je trouve ici une solitude de contemplation des plus ressourcante. Les seules activites humaines que je vois sont de rares voitures qui empruntent un chemin sur l’autre rive de la riviere. Naturellement je fini par parler tout seul, rire de mes propres blagues et parler aux papillons qui se mettent a l’abri du soleil sous ma bache. J’imagine alors l’etat psychologique que l’on peut atteindre par un plus long isolement.
Parallelement a cela, je ne me suis pas souvent senti aussi libre.

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Le 21 aout, a 7h du matin tombent les premieres goutes par des temperatures plus fraiches. C’est l’heure du petit dejeuner et j’hesite a quitter mon toit pour preparer le feu en esperant que la pluie cesse. Mais mieux vaut garder les vetements secs au cas ou ca perdure. Je reste alors allonge a somnoler.



Apres quelques heures, la pluie a forci et des goutes m’arrivent dessus. Mieux vaut alors garder le duvet sec en l’utilisant comme oreiller dans sa housse de protection. J’installe alors des ficelles depuis la poutre principale afin de devier les goutellettes. Au fil de la journee j’enfile finalement tous les vetements possible et j’entame alors le plus grand exercice de patience que j’ai pu avoir. Une journee durant, je reste allonge ne trouvant curieusement ni l’envie d’ecrire, ni celle de lire. Cette fois ci, je vis le temps, chaque seconde, chaque minute, chaque heure. J’observe et j’ecoute la pluie tomber comme nous ne prenons pas assez le temps de le faire. C’est une vrai melodie que j’accompagne de temps en temps a l’harmonica ou a la guimbarde.

Toute la journee, mon seul souhait se resume a faire un feu. Pas seulement un feu qui rechauffe, mais un feu qui anime, celui qui se contemple d’une certaine manière. Mais cela s’annonce déjà tres mal ; tout est trempe dehors. 


A 22h, la pluie cesse. Je suis reste tellement longtemps immobile que je sors de suite a la recherche de combustible, lampe frontale allumee. S'il y a une chance de faire du feu, je dois la saisir !

Ecorce epaisse en guise de plat, ecorce de boulot pour demarrer le feu (combustion rapide et vive, meme mouille) et du bois flotte que j’ « epluche » pour retirer la partie humide et que je taille en allumettes. Le tout dispose en cone permettant une bonne aeration, une concentration du foyer et le sechage des branches exterieures.

Apres 45 minutes de preparation minucieuse, l’instant fatidique. J’allume a la base et en quelque seconde un veritable brasier prend de la hauteur. Je n’avais pas prévu de réapprovisionner si vite et je dois courir aux alentours, tout fou et en rigolant, pour alimenter ce feu tant attendu. Meme les troncs reserves a la construction y passent ! Le moral reprend de plus belle et je peux enfin me preparer un the et le diner en triple portion. 


Aucune etoile ne perce le ciel nuageux et la nuit en est d’autant plus sombre. Je ne discerne rien, excepte le chant semblant eternel de la riviere. Le feu trone dans un cadre pareil et ce n’est que vers 3h du matin que je reprends place dans le duvet, bien heureux et le ventre plein.

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Le 22 aout, il me reste largement assez de feculents mais j’arrive au bout des sachets de soupe en poudre qui servent de sauce. Le pain, le saucisson et le chocolat commence aussi a manquer. Je decide alors de partir en fin de matinee en reapprovisionnement a Vydrino. Cela me prend 2h aller-retour mais je peux a nouveau me faire plaisir sur l’alimentation grace aussi a quelques fruits.

 

lundi 18 août 2014

18 Aout 2014 : Lac Baikal


 












La nuit fut humide et il a fait si bon que l’utilisation du sursac impermeable a été de trop. Il semble en effet avoir retenu plus d’humidite de l’interieur par condensation que depuis l’exterieur. Je tente alors de faire secher la bache, le duvet et le sursac mais rien y fait. Les rayons du soleil a 7h du matin ne suffisent pas. Je devrais faire secher tout ca plus tard et si possible avant de commencer la rando car l’humidite contenue alourdi d’avantage mon sac.

 Au moment de refaire mon sac, un vieil homme empruntant le sentier me salut chaleureusement, visiblement surpris de ma presence, tout comme je le suis de lui finalement.

Je rejoins alors la route afin de tendre le pouce et rencontre un autre vieil homme dans sa fourgonnette me proposant de m’emmener jusque Baikal’sk. Sur la route, compte tenu d’une communication limitee, je joue au contemplatif pour attendrir mon conducteur. Penche en avant, les coudes sur les genoux et la tete en girouette a puiser le maximum de ce paysage unique. J’ai déjà utilise cette technique bien souvent et elle a toujours fonctionne. Dans le cas contraire, sortir l’appareil photo !

Ici, je ne m’attendais pas a de telles montagnes meme en ayant analyse les courbes de niveaux de ma carte. Je commence alors a devenir dubitatif quand a cette rando compte tenu de la masse de mon sac.

Je suis aussi surpris par la taille des rivieres que nous traversons et arrivant tout droit des cimes. Sur les derniers kilometres et pour laisser une bonne impression j’essais de demander a mon conducteur par les gestes si la peche est bonne dans ces rivieres. En faisant un peu l’idiot j’obtiens son sourire. C’est gagne !

Une fois depose, je marche a nouveau vers la sorti de la ville en tendant le pouce mais une barriere entre la route et le trottoir ne me s’implifie pas la tache si bien que 30 minutes plus tard, j’y arrive toujours pieton. Apres un nouveau bon moment de patience, un vieux monsieur veut m’aider en m’expliquant qu’il va me conduire a la gare (je parle bien sur de mon interpretation de son russe et ses gestes). A la limite pourquoi pas, me dis-je. Le stop c’est merveilleux mais le transiberien c’est aussi quelque chose !

Je me laisse donc entrainer de la meme manière qu’avec Nastya et Olga hier matin. Plus loin, il me confit a une femme alors qu’il se rend ailleurs. Nous continuons de descendre le sentier quand je suis surpris de passer sous la voie de chemin de fer. Apres 15 minutes de marches, nous arrivons a une gare routiere ou des mini bus sont stationnes. La femme me dirige vers l’un d’eux mais ils semblent qu’il y ai un hic. Une des passageres qui patientent a l’exterieur m’assaille en russe a 20cm du visage et semble vouloir me faire comprendre que je ne peux pas emprunter ce bus, faisant naitre en moi un sentiment d’ostracisme attise par la barriere de la langue.

Face a cela, riposter ne servirait a rien. Je prefere sourire et continuer a passer une bonne journee. Je tente juste de m’adresser au chauffeur en lui tendant de l’argent pour le billet mais il semble déjà avoir pris le parti de ses clients en m’ignorant.

Voila quelque temps que je n’avais pas rencontre de cons, au sens de Serge Reggiani dans sa chanson Le Temps qui Reste que j’estime enormement : « J’ai tant de gens a voir (…) des tres intelligents et des cons. C’est drole les cons, ca repose. C’est comme le feuillage au milieu des roses ».

Je dois maintenant retourner a mon precedent spot de stop en perdant 45 minutes de cette precieuse journee. En route, la precedente situation tourne en boucle dans ma tete et je m’efforce de trouver d’autres interpretations moins negatives que de premier abord ; telle qu’est construite ma philosophie. Peut etre mon sac est-il trop gros…

Le pouce de nouveau tendu, je tombe rapidement sur Alex dans son pick up qui part travailler a Ulan-Ude, laissant l’idee de l’accompagner sur la route de la Mongolie, traverser mon esprit. Mais j’ai encore beaucoup trop a decouvrir dans ces contres pour partir si vite. Compte tenu de son bon niveau d’anglais, je n’echappe pas a la presentation de mon voyage et je suis de nouveau touche par l’interet qu’il y porte et ses encouragements.

Je pense en fait ne pas me rendre compte de l’ampleur finale (et j’insiste sur le « finale ») de ce voyage. Je mesure en effet l’intensite de chaque moment, chaque rencontre, chaque decouverte de culture, chaque degustation de mets locaux ; mais le fait de ne pas encore penser a mon retour, m’empeche de visualiser mon voyage dans sa finalite.

Un autre facteur entre selon moi en jeu, l’adaptation. Mieux elle se passe, moins on se sent a l’etranger. Mais cette sensation est personnelle.

Quand mon entourage me vois a l’autre bout du globe dans un environnement inconnu, je vois mon petit train-train de vie, habitant du monde. Voila pourquoi j’ai toujours l’impression que les reactions des gens quant a mon voyage sont toujours demesurees.

En route, Alex qui connait la region me parle de la vallee que j’ai choisi. Et ca semble pas mal du tout ! Il se rend d’ailleurs de temps en temps au lac que je vise pour pecher. Il me parle aussi d’un service de transport pour se rendre a 5km du lac… en hydroglisseur !

En repensant au chargement de mon sac qui ferait mieux d’etre encore un peu complete, j’imagine que cela pourrait etre une bonne alternative a juger au prix. Il m’emmene alors au quai d’embarquement afin de voir ca de plus prêt. C’est en effet un bel engin mais a 60 euros la course, c’est vite regle ! Je ferai la route a pied ! Avant de me laisser, Alex m’emmene dans un commerce de quartier ou je complete mes provisions de pain et saucisson, des valeurs sures !

En ce debut d’apres midi, j’ai une demi-journee de retard sur le programme et je suis charge comme une mule. Depuis le debut du sentier, rive droite de la riviere, je contrôle frequemment l’heure, la boussole et tente de me localiser sur la carte en vue d’estimer mon avancement. Mais celui-ci s’apparente lent, trop lent et trop charge pour un tel objectif. Je me resilie donc a garder un œil sur les bords de riviere que je longe de prêt ou de loin afin d’y installer mon campement.

Apres 1h30 de marche ou je me ravitaille frequemment en sucre avec des framboises de bois, j’arrive sur un bord de riviere qui m’inspire enfin. Face a moi, une ile etendue d’une centaine de metres et d’une dense vegetation s’impose au milieu d’une etendue de galets d’ecrivant au premier plan un bras secondaire de riviere d’un niveau actuellement tres bas et que je traverse aisement pour atteindre la pointe amont de l’ile. Celle-ci semble d’ores et déjà tres interessante pour bivouaquer. De l’autre cote, la riviere principale brasse un volume d’eau considerable avec ses 30 ou 40m de large et compte tenu de l’environnement, je considere son eau potable (comme tres souvent en randonnee et sans aucun probleme). Je trouve aussi du bois flotte partout, du tronc a la petite brindille, de quoi alimenter des feux de camp sans limite. Je pose alors mes affaires et pars en reperage autour de l’ile. Pendant 30 minutes, tous les elements sont pris en compte : ensoleillement, qualite du sol, zone innondable ou venteuse, proximite du bois flotte ; tout en m’eloignant de la ligne a haute tension qui traverse la riviere au niveau de la pointe avale de l’ile.

 

 


Je retiens finalement une petite zone de sable de la taille d’un couchage au milieu de galet, a 30m de la riviere principale et expose plein Sud proche du flanc de l’ile.

Je joui, en ce milieu d’apres midi, de ne pas avoir a installer mon campement au plus vite, m’autorisant ainsi un instant de detente. Je pars alors a la chasse aux vers de terres et installe des lignes de peche en esperant un festin de soiree. Mais la puissance du courant et la meconnaissance du lieu m’empeche de sortir quoi que ce soit de l’eau.

Il est ensuite temps d’agir plus serieusement en construisant un etandage a linge que j’utilise de suite pour le sac de couchage et le reste des affaires encore humides de ce matin. Vient enfin la preparation de l’abri avec les batons de marche et la bache en cas de pluie, le poncho, le matelat et en ayant pris soin de faconner la bande de sable au prealable pour epouser la forme du dos. Demain, je pourrais consacrer la journee si je le souhaite a agencer différemment et plus solidement mon campement qui s’annonce déjà confortable.

En fin de journee, je prepare le feu, le diner, le couchage et c’est avec une tasse de thé que Nikolay m’avait offert a Kazan, que j’accueille la nuit des plus paisiblement sur un fond de clapotis de la riviere.