Les vetements en guise de matelas ont
assouplis la durete du beton et je me lance plein Ouest avec la volonte de
m’arreter d’avantage dans les villages a la recherche d’interactions sociales.
Je fais le tour d’un petit temple bouddhiste
sur la route avant de m’arreter dans le village de Ban Nam Chat ou je me
promene et rencontre une tripote d’enfants qui jouent dans leur cabane, a
s’inventer des histoires. J’ai habituellement du mal a prendre en photo des
gens puisque cela peut s’averer impoli voir deplace, mais face a leur joie
apparente de poser et de voir les photos par la suite, je me prends au jeu.
Certains vont vouloir absolument etre sur les photos tandis que d’autres vont
les fuir, malgre tout en rigolant. Ces enfants, pieds nus, aux vetements sales et
a la frimousse parfois terreuse sont fascinants. Je les vois intrepides,
insoussiants,
chaleureux et avec tout cela, respectueux.
Ici, il n’est pas question de caprice pour avoir le dernier jeu video ou
les chaussures de telle marque ; et je ne m’exclu pas de la
generalisation, c’est une remise en question. A vrai dire, lors de mes 3 mois
au Vietnam, j’ai completement perdu l’habitude de voir des caprices. Alors a
qui la faute de ces differences de comportement ? L’education, la
culture : indubitablement. Le niveau de vie : probablement. La
societe, qui chez nous est gavee de luxure et de surconsommation : voila
un point interessant.
Cela me fait penser a un camping-car apercu avec
surprise a Phonsavan et immatricule en Bretagne. Cette famille a en effet
voyage tout du long et je ne peux m’empecher d’imaginer l’enrichissement non
seulement culturel mais aussi psychologique pour ces deux enfants d’environ 4
et 6 ans. Voila de quoi en faire des personnes reflechies et tolerantes.
Il n’y a pas de doute, ces petits qui
m’accrochent le bras lorsque je leur montre les cliches, redonnent la patate et
je peux reprendre la route en quete d’un nouvel abri.
A la sorti d’un petit village charmant, un
beau point de vue me permet de reperer sur une colline des petits abris comme
on en voit partout. Sejourner 2 nuits dans l’un d’entres eux serait parfait.
En fin d’apres midi, le campement est installe
et le feu prêt a etre allume. Je dois juste redoubler de prudence car sans
compter la composition de l’abri, il y a surtout un gros tas de paille juste a
cote dont je me sers d’ailleurs pour confectionner un bon matelas. Ce soir,
j’eteindrai le feu avant de m’endormir.
Dans la soiree, alors déjà couche, des
chasseurs viennent me mettre leur lampe frontale dans le visage et en me disant
quelque chose que je ne comprends pas bien sur, mais pas pour me souhaiter une
bonne nuit. Ils restent alors juste a cote pendant facilement 30 minutes a
discuter, tandis que j’essais de retrouver le sommeil.
A 7h de ce 1er fevrier, je suis
reveille a nouveau par 6 ou 8 chasseurs (les memes ?). Je me montre alors
sympathique en me disant qu’ils ne sont que de passage. Les minutes passent et
ils ne decampent pas. Je me suis fait au cote decontracte des gens ici mais
c’est quand l’un d’entre eux me demande s’il peut voir mon passeport que j’ai
la sensation que la tournure change. Comme je n’ai rien a me reprocher et
qu’afficher un blocage n’irait pas dans mon sens, je lui tends. Peu apres, des
coups de fil sont emis et je me sens concerne.
Pendant 2h30 je reste entoure et tout ne
semble pas couler de source. Un premier doublet de policiers debarque puis, un
second. Des notes sont alors prises mentionnant mon nom, mes origines, la
plaque d’immatriculation de la moto, mon itineraire et probablement d’autres
elements. Tout du long je me demande ou est le probleme mais leur anglais n’est
pas suffisant pour me repondre. Alors je bois mon cafe dans un cul de bouteille
en plastique en restant tranquille, meme lorsque l’un des officiers procede a
la fouille de mon sac comme jamais depuis 6 mois.
En fait cela m’irait tres bien s’ils me
disaient juste que cette cabane est prive ou n’importe quelle autre raison a cet
interrogatoire champetre, alors que certains on des fusils a baïonnette a
l’epaule et d’autres des fusils automatiques.
Finalement, je suis prie de quitter les lieux
sur le champ, ce qui m’arrange apres un tel accueil. Au moins, personne ne
m’aura demande d’argent. Seul un des derniers officiers me demandera avec un
grand sourire si un vetement technique puis mon manteau sont pour lui. Mais tu
peux toujours courir mon vieux, ai-je en tete. Je fais juste mine de
rigoler en refutant.
Quelle drole d’experience, me dis-je sur la
moto. Mais le fait est la, je ne peux me permettre de dormir en hotel pendant 1
mois, alors je serai desormais plus discret encore mais je continuerai de
dormir a la belle etoile.
A Muang Phu Khun, a l’heure du dejeuner, je
m’installe dans un petit restaurant locale a la table d’un couple Belge, a moto
pour la semaine. Je leur conseil alors l’auberge ou j’etais a Phonsavan ainsi
que la cascade, avec croquis a l’appui pour la trouver. De leur part, je recois
des informations quant a une autre cascade dans la region de Luang Prabang.
L’entre-aide entre voyageurs est telle une institution.
A present dans un « grand village »
je passe l’apres midi a ecrire sur la terrasse d’un petit hotel ou une belle
vue sur la vallee aide a l’inspiration.
A 17h, alors qu’il est temps d’aller camper,
je ne resiste pas a assister a une partie de petanque au bar d’en face, et
croyez moi, ils ont tout de bons joueurs assidus. La cordelette, la biere, ca
tire, ca pointe, ca titille le cochonnet, et un point est un point ! On se
croirait chez soit. Quand l’un d’eux me tend un verre, je pause mon sac, ce qui
veut dire : le campement viendra plus tard, je suis parti pour rester un
certain moment ici. Je les observe donc finir leur partie alors que nous echangeons
tres legerement en anglais mais j’en profite pour m’initier d’avantage au
Laotien. Il serait surtout tres amusant de connaitre le vocabulaire de la
petanque que je pourrais ressortir a bien des reprises. C’est en effet et
curieusement un sport (oui oui !) tres populaire au Laos.
OK les copains ! C’est bien joli de
remplir mon verre des qu’il se vide mais j’ai le poigne qui me demange a vous
regarder ! Je prends donc part a une doublette, tres excite mais surtout
avec la pression de la petanque Francaise et Belge sur les epaules. De temps en
temps, mon partenaire et moi-même nous retrouvons autour du cochonnet pour se concerter,
on tire ou on pointe ? C’est alors que rapidement nous adoptons le
« Boom » lorsqu’il faut tirer, role que j’ai l’honneur de recevoir
rapidement. « Boom Francois ! » dit-il, voila que nous nous
comprenons. La nuit tombe, les bieres aussi et nous voila a gagner nos deux
parties. Je les laisse alors jouer la derniere ensemble puis, avec un petit
coup dans le nez, tout le monde rentre chez soit.
Par
chance je trouve 50m plus loin un terrain vague ou je m’installe
directement a l’essentiel mais 1 ou 2h plus tard, mon duvet est déjà assez
humide a l’exterieur. Je n’ai pour l’instant pas froid mais toute la nuit ainsi
ne serait pas une bonne idee et c’est a la lumiere de la lune que j’installe la
bache en biais, de la moto au sol.
En fait, le but est ici de gagner du temps sur
le programme d’Alex et Clemence rencontre a Phonsavan. Ils sont actuellement a
Vientiane et j’aimerais beaucoup les recroiser dans quelques jours a Luang
Prabang. C’est ainsi que le 2 fervrier, je commence par le petit dejeuner local,
a savoir le pho. Ce plat tres present aussi au Vietnam est une soupe de nouille
avec morceaux de viande et legumes qu’on agremente a notre guise de menthe,
sauce pimentee, et j’en passe. C’est, lorsqu’il est bien prepare, delicieux. Je
retourne ensuite sur la meme terrasse qu’hier pour ecrire encore et regarder la
serie de Africa Trek, partage par mon couple d’ami. Je me rends compte
d’ailleurs que je commence a me comparer a ces grands aventuriers. Je reste bien sur qu’un modeste voyageur mais
ce genre d’aventure me tire de l’avant. L’idee d’atteindre peut etre un jour le
cercle des explorateurs francais est une grande motivation pour perdurer dans
les experiences de voyage profond.
Le soir meme je retourne a mon precedent lieu
de bivouac, j’ai beau dormir sur du dur, je suis a l’ecart et je sais déjà
combien de temps je mettrai pour etre couche.
Le lendemain matin je recommence le meme
scenario mais je ne suis alors plus invite a rester sur la terrasse de cet
hotel. Il manque surtout un bar pour la part de consommation. Alors je me remet
en route doucement jusqu'à Ban Namming, a mi route pour Luang Prabang, ou apres
avoir assiste a une partie de petanque d’un groupe de policier visiblement tres
decontracte, je trouve un coin tranquille pour camper. Notons que juste avant, j’ai
roule sur un petit serpent noir raye vert qui me fais enfin prendre conscience
de l’hostilite de la brousse ici. Je dors heureusement cette fois ci en hamac
sous bananiers et autres arbres pourvus de grosses feuilles mortes qui, en
s’entrechoquant par la brise, emet un son inhabituellement grave. Cette
atmosphere de jungle s’accentuera desormais en descendant des hauteurs.
Dans la soiree, alors que je prepare mon diner
nouilles œufs (encore et toujours) toutes mes pensees vont a Julien, un cuistot
Belge rencontre en Mongolie, revu en Chine puis au Vietnam ; lui qui
s’avait rendre une gamelle delicieuse en y ajoutant de simples epices et
condiments. Ce soir, j’ai de l’ail et la saveur de mon plat est déjà meilleure.
Merci l’ami !
En ce 4 fevrier matin, j’arrive a Luang
Prabang sous un soleil radieux et une chaleur qui me change ! Il y a en
effet 2 semaines, les temperatures n’excedaient pas les 8 degres dans ma
chambre a Sapa.